Résiste © Ian Grandjean

Saison culturelle

Bouillon de cultures à Pantin

« Nous avons hâte de retrouver le public ! », clament à l’unisson les artistes. Et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en 2020/2021, ils seront servis. Morceaux choisis d’une saison où vont s’enchaîner les créations, les spectacles novateurs et la reprise de classiques dans toutes les disciplines : théâtre, musique, danse...
Article de Alain Dalouche, publié dans Canal n°289, septembre 2020.

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Casino royal


« Dans le titre, vous pouvez lire “Lies” (mensonges), “Eyes” (yeux) ou encore livre sterling, yen, euro et dollar… », avance la compagnie Ontroerend Goed, sur ce spectacle de théâtre participatif, évoluant entre fiction et réalité. L’expérience immersive se déroule autour de tables de jeu en demi-cercles où prennent place les spectateurs. Les comédiens, vêtus de noir, jouent le rôle de croupiers. Un jeu ? Plutôt une histoire, celle du système financier. Placés dans le rôle d’apprentis traders, les spectateurs débutent par des opérations simples. S’enchaînent investissements, alliances, OPA... réveillant de gentils souvenirs familiaux de Monopoly. Mais la réalité est moins douce et la cupidité convoquée dans ce tripot clandestin.

£¥€$, samedi 20 mars, 18.00 et 21.00, salle Jacques-Brel.

L’odyssée d’Yngvild

La plus francophone des marionnettistes, la norvégienne Yngvild Aspeli, a accepté de nous révéler les arcanes de la mise en scène de l’odyssée de Moby Dick.
« Le point de départ de cette mise en scène ? Mon grand-père était marin. Il avait une femme nue tatouée sur son bras [rire]. Ensuite, la langue d’Herman Melville m’a énormément touchée. Cette aventure de chasse à la baleine nous plonge dans des questions existentielles. Moby Dick est une œuvre monumentale parce qu’elle aborde des questions universelles avec une vraie profondeur. Je me suis concentrée sur l’histoire du capitaine Achab pour pouvoir entrer dans la folie de ce personnage. Nous allons retrouver 50 marionnettes, sept acteurs et trois musiciens polyinstrumentistes avec une musique jouant sur un travail choral porté sur scène. »

Moby Dick, mardi 2 février, 20.00, théâtre du Fil de l’eau.

Les voix du silence


Dans Mailles, la musicienne, auteure et chorégraphe Dorothée Munyaneza réunit les voix de six femmes, artistes noires et afro-descendantes, venues des quatre coins du monde. « Il s’agit de raconter l’universel de nos histoires mêlées. Cette multitude de femmes s’exprimera dans différents espaces que nous allons habiter avec nos récits, nos paroles, nos chants et nos mouvements », précise la native du Rwanda qui prend la parole pour porter des voix silencieuses : celle des Tutsis massacrés ou encore des femmes battues. « Nous sommes reliées par une ligne de récit et le geste créatif de la plasticienne Stéphanie Coudert va contribuer à coudre cette ligne », souligne Dorothée Munyaneza, déjà programmée à deux reprises à Pantin (Samedi détente en 2016 et Unwanted en 2017).

Mailles, mardi 1er décembre, 20.00, théâtre du Fil de l’eau.

Initiales BB


Des intonations à la Bashung, un physique de baroudeur-rêveur et une intention musicale affirmée font de Bertrand Belin une figure de la pop française. Souvent énigmatiques à la première écoute, ses chansons romancent l’ordinaire. Hors des sentiers battus, il reprend une sélection de son (large) répertoire, accompagné par cinq percussionnistes. Les timbres peu connus des xylophones, vibraphones et autres marimbas modèlent une esthétique musicale peu ordinaire, obsédante et répétitive, comme ses textes dans lesquels il cultive l’art de la répétition.

Bertrand Belin et les percussions claviers de Lyon, jeudi 8 octobre, 20.30, salle Jacques-Brel.

Charlot des temps modernes


L’acrobatie des mots, la poésie des gestes et le réalisme des images révèlent la souffrance au travail dans un cirque documentaire burlesque. Sur scène, l’acrobate Julien Fournier se démène sur un tapis roulant pour garder un semblant d’équilibre ou s’emploie à tenir le cap en manipulant des cartons qui le malmènent. Les tâches absurdes et répétitives s’enchaînent. Le burn out guette.
En écho, la voix de la poétesse Laurence Vielle égrène les mots tandis qu’une vidéo affiche des données sur le monde du travail. « Il s’agit de nous engager, corps, mots et images, pour dire qu’il y a ceux qui souffrent de ne pas travailler, ceux qui souffrent d’avoir rongé leur vie comme un os en travaillant », avance l’écrivaine dont les mots s’appuient sur des témoignages réels. Comment ne pas penser aux Temps modernes de Charlie Chaplin avec cette pantomime du travail ?

Burning, mardi 13 octobre, 20.00, théâtre du Fil de l’eau.

Clotilde Hesme met les gants


Une jeune secrétaire médicale, interprétée par Clotilde Hesme, reprend ses études de médecine après avoir vu Rocky III au cinéma. L’actrice, accompagnée de son complice, le musicien et comédien Pascal Sangla, monte sur le ring les mots de la nouvelle de l’écrivaine Emmanuèle Bernheim, Stallone. La poésie du combat et de la persévérance pose avec humour la question de l’influence d’une œuvre dans la construction de nos destins. « Quand j’ai lu Stallone, précise le metteur en scène Fabien Gorgeart, j’ai été ébloui : la nouvelle raconte l’histoire de Lise, une jeune femme qui, depuis qu’elle a vu Rocky III, a renoué avec le bonheur. Elle se sent une dette envers son acteur et héros. Moi-même, j’ai vécu un tsunami émotionnel lorsque j’ai découvert, enfant, avec mon père, Rocky II au cinéma. »

Stallone, jeudi 15 octobre, 20.00, théâtre du Fil de l’eau. 

Dracula en culotte courte


Frédéric Maurin, directeur de L’Orchestre national de jazz (ONJ), dévoile comment Dracula, son premier spectacle jeune public, a pris forme.

Canal : Qu’est-ce qui a suscité cette première création pour le jeune public ?
Frédéric Maurin : Notre but était de donner aux plus jeunes le goût du spectacle vivant et de la musique en concert. La musique, ce sont des gens qui jouent pour d’autres gens et ceci tend à disparaître avec la prédominance de la musique enregistrée.

En quoi cette création est-elle adaptée aux plus jeunes ?
F.M. : Dracula commande un orchestre qui joue des partitions très contemporaines, des chansons, mais aussi des standards… Les musiciens sont ses valets ou des animaux nocturnes identifiés par un accessoire.

S’agit-il d’une sorte d’opéra-jazz ?
F.M. : C’est une forme un peu hybride, comme un petit opéra de poche avec du mime, du théâtre, beaucoup de récitatifs et peu de parties chantées. La scène est occupée par deux comédiennes et neuf instrumentistes qui interpréteront une grande diversité de sons.

Dracula, jeudi 10 décembre, 20.00, salle Jacques-Brel.