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Développement économique

Fleurons de l'industrie à Pantin

L’histoire de Pantin est intimement liée au développement industriel de l’Est parisien. Regroupant 464 entreprises qui emploient au total plus de 3000 salariés, le secteur de l’industrie a encore de beaux jours devant lui. Canal est ainsi parti à la rencontre de quatre fleurons locaux.
Dossier réalisé par Guillaume Gesret, Anne-Laure Lemancel et Hana Levy, publié dans Canal n°286, mars 2020.

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Tout roule au Technicentre

Sept jours sur sept, 24 heures sur 24, le Technicentre Est européen perpétue la tradition ferroviaire de Pantin. La mission de ses 620 salariés ? Remettre les trains en état, effectuer les contrôles usuels et remédier aux pannes.

Deux kilomètres de long, un kilomètre de large. C’est peu dire que la taille du site, coincé entre le canal de l’Ourcq et le faisceau ferré, impressionne. Là, comme égarés dans leur course, s’alignent des dizaines de trains au repos. Nous voici au cœur du Technicentre Est européen où stationnent la cinquantaine de rames TGV circulant entre Paris et Strasbourg, Metz ou Nancy, mais aussi des TER Grand Est, des ICE (le TGV allemand), le luxueux Orient Express et, chaque jeudi, le Paris-Moscou. Tous attendent, au-dessus de fosses permettant aux mécaniciens de se positionner, d’être réparés et contrôlés, qu’il s’agisse de grosses pannes ou de révisions usuelles.

Sécurité et confort
En cette fin janvier, à l’intérieur des véhicules, des agents s’activent pour contrôler les tablettes, vitres, sanitaires, néons et autres housses de sièges. S’ils détectent un élément défectueux, ils le remplaceront ou le répareront immédiatement. À la SNCF, on ne lésine pas sur le confort ! Ni sur la sécurité, d’ailleurs. Car c’est également dans ce hangar que s’effectuent des tests, aussi poussés que techniques, sur la vitesse des TGV.
Dans l’entrepôt voisin, les techniciens traitent, quant à eux, les problèmes mécaniques plus conséquents. Là, sont remisées, rigoureusement alignées et triées, les pièces essentielles au bon fonctionnement des véhicules : les bogies (charriots situés sous les trains), les essieux, les archets (éléments en contact avec les caténaires). Graissage, réparation, remplacement… rien n’échappe à leur vigilance.
Aussi studieuse que soit l’atmosphère au sein de ce site industriel XXL, l’ambiance y reste bon enfant. Ici, chacun se salue, se tutoie… Bonne nouvelle : l’entreprise cherche à recruter d’urgence des opérateurs de maintenance électrique et de nombreux autres techniciens. À bon entendeur…

Pour postuler : envoyez un CV et une lettre de motivation à Marine Di Fazio : marine.difazio@sncf.com.

L'AFA : des agendas et calendriers haut de gamme

Voilà 45 ans que les ouvriers de l’Atelier de fabrication d’agendas (AFA), impriment, rue Cartier-Bresson, les agendas et calendriers haut de gamme du groupe Exacompta-Clairefontaine.

L’Atelier de fabrication d’agendas (AFA) occupe, depuis 1975, une ancienne manufacture de la rue Cartier-Bresson qui nous replonge immédiatement dans le passé industriel de la ville. C’est dans ce décor fait de briques et de charpentes métalliques que sont conçus et imprimés des agendas d’exception. Parmi les clients de l’entreprise familiale, Chanel, Montblanc ou encore Mignon. Si les pages sont assemblées et les couvertures de cuir apposées au sein de l’usine du groupe située quai de Jemmapes, le savoir-faire des salariés pantinois est reconnu dans toutes les maisons de luxe de la place de Paris. « C’est très motivant de travailler dans une entreprise qui valorise la qualité et qui tient à faire perdurer les savoir-faire. Cela alimente une certaine fierté », assure Claude Servais qui s’occupe, entre autres tâches, de vérifier le contenu éditorial des agendas. « Par exemple, je consulte la confédération des évêques de France pour indiquer les dates exactes des fêtes religieuses de l’année à venir. Même chose avec l’Éducation nationale qui nous donne, à la dernière minute, les dates des vacances scolaires. Il arrive aussi que des clients nous avertissent que la capitale d’un pays a changé. Dans ce cas, je mets l’atlas de l’agenda à jour. » Et l’on comprend mieux pourquoi un agenda confectionné par AFA peut valoir jusqu’à 400 euros.

Savoir-faire traditionnels…
Dans l’atelier, les machines vrombissent de 6h30 à 21h30 tous les jours de la semaine. Environ 2000 tonnes de papier, en provenance de l’usine vosgienne de Clairefontaine, sont nécessaires chaque année pour répondre aux commandes. « Nous sortons 27 millions de feuilles imprimées par an », résume le directeur du site, Robert Vinette.
La plus vieille presse de l’imprimerie date de l’après-guerre. Elle tourne toute l’année pour sortir les fameux bloc-pratics d’Exacompta. Cyrille Peligry connaît cette machine sur le bout des doigts. Et pour cause, il travaille dans l’imprimerie depuis 21 ans. « Ici, se réjouit-il, les presses ne sont pas numériques, le métier reste manuel et donc intéressant. » Les trois autres presses, plus modernes, impriment à une cadence impressionnante. Elles sont tellement lourdes – près de 40 tonnes chacune – qu’une chape spéciale a dû être coulée pour pouvoir supporter leur masse.

… Aspirations modernes
Mais ce dont Robert Vinette est le plus fier, c’est de la qualité du papier imprimé. Un papier au toucher tellement doux. « C’est la marque de fabrique de Clairefontaine ! », s’enorgueillit-il. Et de vanter ensuite le plaisir du travail bien fait et le respect des traditions qui guide chaque salarié de l’atelier. « Nous avons aussi su nous moderniser en investissant dans des machines moins polluantes. De plus, l’ensemble de nos déchets sont valorisés et nous utilisons beaucoup moins d’eau que par le passé grâce aux avancées technologiques. Nous avons d’ailleurs obtenu le label Imprimerie verte », conclut-il. 

Loupi : une entreprise spécialiste de l'éclairage LED

Mettant en lumière musées, boutiques de luxe, palaces et monuments historiques dans le monde entier, Loupi a fait de la belle lumière son ADN et de la LED sa spécialité… Coup de projecteur sur une entreprise innovante.  

Depuis son installation en 2018 rue Denis-Papin, Loupi, spécialiste de l’éclairage LED, LA source lumineuse contemporaine, plus durable et moins énergivore, a doublé sa surface et ses capacités de production. Dans cette usine de 1800 m2 située aux Quatre-Chemins, 40 salariés œuvrent à la conception et à la production de solutions lumineuses LED, pensées pour les professionnels. On doit à cette entreprise florissante l’éclairage des châteaux de Versailles et d’Azay-le-Rideau, de la grotte Chauvet ou de l’UGC Ciné Cité du XIXème arrondissement. Loupi a également mis en lumière des enseignes de luxe (Lancel, Cartier…) et des expositions au Louvre d’Abu Dhabi ou au Musée national de Tokyo. « Nous nous adaptons à des critères de préservation des œuvres d’art très pointus », explique Emmanuel Campagne, directeur général de Loupi, Pantinois depuis 20 ans. Également aux manettes de cette société créée il y a 40 ans, son fondateur, Fabien Poutignat.

À la pointe de la transition écologique
Très attachée au made in France, l’entreprise, qui a créé 30 emplois et multiplié son chiffre d’affaires par 3 en 10 ans, réalise aujourd’hui 90 % de sa production dans l’Hexagone. « Nous avons une niche et une obsession : faire de la belle lumière, assure Emmanuel Campagne. Une lumière proche de la bougie ou du soleil qui nous rappelle que nous sommes des animaux cherchant réconfort et chaleur. » Et, pour voir cette quête aboutir, Loupi réinjecte 10 % de son chiffre d’affaires dans la recherche et le développement, via son laboratoire interne.
Mais l’entreprise a un autre credo : devenir écologiquement vertueuse d’ici à 5 ans. « Avant, c’était une conviction. Aujourd’hui, c’est devenu un axe de développement stratégique », insiste Emmanuel Campagne. Récupération d’anciens éclairages pour recycler leurs composants, commerciaux se déplaçant en voitures électriques bientôt rechargées grâce aux panneaux solaires maison, élimination du plastique à usage unique… Rue Denis-Papin, « les salariés s’approprient ces changements en participant à des groupes de travail. Ça donne un sens à notre entreprise. »

Responsabilité sociétale
Loupi cultive enfin le bien-être au travail. Une cuisinière maison concocte ainsi des repas bio quotidiens, des tables de ping-pong et des cours de yoga sont proposés dans les locaux. « Une entreprise a aussi une responsabilité sociétale : elle doit être actrice du changement et participer à la transition énergétique. »

Eqiam : une entreprise dans le béton

Sur son unité de production pantinoise, réhabilitée en 2016, Eqiom produit 50 à 60 000 mètres cubes de béton par an, en faisant en sorte de maîtriser son empreinte écologique. Reportage parmi les silos et les tapis roulants.

Dans un bâtiment surélevé, sorte de tour de contrôle, Sony, épaules carrées et sourire bonhomme, examine ses multiples écrans. Deux sont consacrés à la télésurveillance ; un autre affiche le planning de livraison ; un troisième suit les camions sur les routes ; un quatrième retrace, en temps réel, le processus de production sur le site ; d’autres encore permettent d’établir les formules de béton à livrer. La mission de ce technicien ? Gérer le flux des matières premières – plus de 100 000 tonnes de sable, granulat, ciment et adjuvants sont utilisées chaque année –, superviser la fabrication et l’acheminement du produit fini vers les clients : des particuliers, des PME et des multinationales, à l’image de Bouygues, Eiffage ou encore Vinci.
Nous sommes chez Eqiom Bétons, une entreprise de fabrication de béton prêt à l’emploi, où officient, sur ses 15 sites d’Île-de-France, 85 salariés. Celui de Pantin a été réhabilité en 2016, grâce à une collaboration entre le service des Canaux de Paris et la ville afin qu’il s’intègre à son environnement immédiat. S’étalant sur 4 000 m2, l’endroit impressionne par ses énormes cylindres blancs dressés vers le ciel et ses tapis convoyeurs qui, vus de la rive, ressemblent à des toboggans géants.

L’atout canal
Si le canal a longtemps constitué une frontière scindant la ville en deux, l’entreprise met aujourd’hui à profit cette précieuse voie d’eau. Ainsi, la matière première arrive par péniche depuis la plateforme de Vernou (Seine-et-Marne). De quoi éviter la circulation de 4000 camions et de réaliser une économie d’environ 500 tonnes de CO2 par an, et surtout libérer les berges des véhicules… pour le plus grand bonheur des promeneurs. La société puise également dans le canal l’eau nécessaire à la fabrication du béton, en déclarant, bien sûr, chaque mètre cube «  emprunté ».
Une fois livrée, la matière première est aspirée pour être stockée dans les énormes cylindres blancs. Lorsque Sony lance la production, après avoir enregistré la formule requise – le site pantinois est capable de produire plus de 200 combinaisons de béton –, des balances pèsent les trois matières premières, ensuite transportées sur les tapis roulants, selon un circuit précis. Le mélange atterrit dans le malaxeur, une grosse araignée qui brasse les ingrédients et fabrique, selon la puissance, un béton plus ou moins souple. Les camions toupie se connectent enfin à la centrale pour récupérer le béton, puis le livrer.

Production de proximité
Construction des stations du futur Grand Paris Express, extension de la ligne 11 du métro, aménagement de la porte Maillot… En ce moment, Eqiom, qui recrute ses salariés « sans autre qualification que la bonne humeur et l’esprit d’équipe », selon les mots de Fabien Van Moorleghem, responsable d’exploitation des 15 sites, travaille sur des chantiers emblématiques de la région. Son béton a même servi à construire certains bâtiments du quartier du Port. Un bel exemple de circuit court.

Recrutement sur le site internet d'Eqiom.