Patrimoine
La grande halle Pouchard, un patrimoine d'exception à Pantin
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Comment restaurer sans dénaturer, notamment la grande halle ?
Alain Moatti : Les deux idées motrices de mon approche architecturale sont que le premier acte écologique en ville consiste à ne pas démolir et qu’il faut construire la mémoire du futur. Ainsi, je conserve tout ce qui a encore quelque chose à nous dire, qu’il s’agisse du patrimoine bâti ou de ce qui a été déposé par l’humain qui y a vécu. On préserve donc des éléments de l’architecture qui peuvent être transmis en y ajoutant les services destinés aux nouveaux usagers. De la grande halle, subsisteront les volumes, la charpente en métal, la brique… On y intégrera une façade transparente en verre ondulé qui rappellera les reflets du canal.
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre concept de mémoire du futur ?
A.M. : Une fois l’enveloppe extérieure rénovée, je sais que tout ce que j’apporte à l’intérieur sera peut-être un jour retiré. Les choses nous sont léguées mais elles pourront servir à autre chose dans l’avenir : c’est cela, la mémoire du futur.
Ce sont donc les usagers qui font revivre les bâtiments anciens...
A.M. : Oui. Ce sont les usages contemporains qui font revivre le patrimoine. J’ai ainsi conçu la future halle comme un lieu où l’on prendra plaisir à la rencontre. Chacun pourra y croiser des personnes ayant d’autres activités. On pourra faire de la musique, travailler, voir des expositions, manger au restaurant, faire du sport… Ce sera une ville en raccourci.
Conserver l’ancien est-il toujours une bonne chose ?
A.M. : Pas toujours. Ce qui compte quand on souhaite redonner vie à un lieu en changeant sa fonction, c’est qu’il y ait un élément symbolique fort qui devienne la centralité urbaine. Dans ce projet, il y en a deux : la halle et le canal. Bien sûr, on peut transformer tout en tout mais le public ne viendra pas partout. Car ce dont les gens ont envie, c’est de se retrouver, de prendre part à l’énergie du lieu. Ils ne viendront pas dans la grande halle seulement pour consommer, ils y apporteront aussi quelque chose, y seront acteurs.
Demain, d’autres bâtiments remarquables seront réhabilités :
> L’église Saint-Germain-l’Auxerrois, sans doute le plus ancien édifice de la ville, est en cours de rénovation et retrouvera sa couleur ocre originelle fin 2022. De récentes fouilles archéologiques y ont révélé la présence d’un ossuaire datant probablement du XIIIe siècle.
> Les travaux de rénovation du Centre national de la danse (CND), emmailloté en raison d’importantes dégradations de sa façade, devraient être rapidement entrepris par le ministère de la Culture.
> Rue Méhul, l’école de Plein air, construite en 1930 selon les principes modernistes et hygiénistes, bénéficiera de travaux à l’automne, financés à hauteur de 63 000 euros par la Fondation du patrimoine, via les gains du loto lancé en 2018.
> Dans le quartier des Quatre-Chemins, La Goutte de lait, qui accueillait un service destiné à la petite enfance incluant la distribution de lait, attend d’entamer sa nouvelle vie.
> Rue Charles-Auray, La Folie, lieu de villégiature datant du XVIIIe siècle, inscrite au titre des monuments historiques, fera bientôt l’objet de mesures d’urgence de protection de sa structure. La ville a également fait appel à l’expertise d’architectes-urbanistes et de bureaux techniques pour travailler sur sa rénovation et la mise en valeur de son environnement.
Retrouvez les autres articles du dossier "Là où dialoguent patrimoine et modernité", publié dans Canal n°299, septembre 2021 :
> "Pantin, là où dialoguent patrimoine et modernité"
> "Le quartier des Quatre-Chemins et son patrimoine"
> "Au coeur des rénovations du patrimoine pantinois"