Art contemporain
Alvaro Barrington : lever de rideau sur un héritier de Basquiat
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Pantin fut souvent comparée à Brooklyn. Aujourd’hui, la galerie Thaddaeus Ropac reçoit justement New York en sa nef. Mais pas n’importe lequel. Celui des nineties, des débuts du hip-hop, surgi de la mémoire enfantine d’Alvaro Barrington, né voilà 40 ans, à Caracas (Venezuela), d’une mère originaire des Grenadines et d’un père Haïtien.
Inaugurée le 18 octobre, They Got Time : YOU BELONG TO THE CITY, exposition magistrale, immersive et inédite, se visite accompagné d’une playlist concoctée pour l’occasion par l’artiste. Dans vos oreilles ? Frank Sinatra, Jay-Z, Queen Latifah, Kanye West ou encore Donna Summer.
Les paysages de la rue
À l’entrée, une représentation des deux figures tutélaires de l’artiste, la magnétique Audrey Hepburn face à Dennis Rodman, l’exubérant défenseur des Chicago Bulls, accueille le visiteur. « Il a fallu trois semaines à Alvaro Barrington, représenté par Ropac depuis 2017, afin de monter cette œuvre pour laquelle il avait entièrement carte blanche », explique Quentin Carvalho, le directeur de la galerie.
L’exposition se découpe ensuite en trois parties. La première révèle, derrière un rideau de chaînes, des devantures métalliques baissées. « Pour Alvaro, gamin aux parents décédés tôt, livré à lui-même dans les rues de New York où il débarque à huit ans, ces rideaux tirés constituaient l’unique horizon, analyse Quentin Carvalho. Au matin, l’ouverture des magasins, lieux de fantasme, symboles du capitalisme, signifiait la possibilité d’une vie sociale et culturelle, la promesse de se forger un style vestimentaire, une identité… »
Dans la deuxième partie, les rideaux, à moitié levés cette fois, laissent apparaître un disquaire avec la tête de Tina Turner dupliquée à l’infini, un magasin de skate, une boutique de vêtements… « Comme d’autres s’adonnent au landscape, lui fabrique du streetscape », note le directeur. « Les rues sont l’appartement du collectif : l’intérieur familier des masses », affirme en effet Alvaro Barrington.
En face des échoppes ? Des tableaux disposés en croix comme autant d’icônes. En leur centre, peintes sur du béton, les idoles 2Pac ou Mary J. Blige. Plus loin encore, des vitraux (en référence aux lampes Tiffany) arborent des peintures-reproductions du film Breakfast at Tiffany’s de Blake Edwards.
Une peinture de références
Le dernier chapitre, Garden, se réfère tant au Madison Square Garden, son temple, qu’au Jardin des délices de Jérôme Bosch. Dans cet espace végétalisé, aux allures paradisiaques, serti de vitraux, le visiteur découvre des œuvres consacrées au basket-ball, ce sport qui a sorti des enfants de la misère. On y distingue la Dream Team des Chicago Bulls, Michael Jordan en tête. Se perçoivent aussi des allusions à Un prince à New York avec Eddie Murphy, des cartes à jouer comme autant d’atouts.
Et nous arpentons ces fausses rues de New York, sa cosmologie pop, à la manière dont lui-même les a sillonnées : dans l’émerveillement et la magie. Avec, en tête, ce titre de Notorious B.I.G., bien présent dans l’exposition, Sky is the limit. Soit la seule frontière capable d’arrêter les rêves d’un gosse des rues.
Informations pratiques :
- Jusqu’au 27 janvier, du mardi au samedi de 10.00 à 19.00, à la galerie Thaddaeus Ropac, 69, avenue du Général-Leclerc.
- Renseignements par téléphone à 01 55 89 01/10 ou sur le site internet de la galerie Ropac
- Entrée libre