Égalité femmes-hommes
L'égalité femmes-hommes passe par la santé des femmes
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Protections gratuites pour toutes !
C’est une dépense qui peut s’avérer insurmontable lorsque l’on a des ressources limitées. Et pour cause : chaque femme dépense 10 à 15 euros par mois* pour acheter ses protections périodiques. D’où le succès des 15 distributeurs installés mi-septembre dans certains équipements publics de la ville.
Pratique, discret et gratuit ! Les jeunes filles qui fréquentent l’antenne jeunesse des Quatre-Chemins plébiscitent le nouveau distributeur de protections périodiques. Contenant des tampons et des serviettes hygiéniques en coton biologique, il a été installé dans les toilettes du bâtiment. « C’est bien que cela se développe, que ça devienne banal, comme au lycée », se réjouit Lynsha, 15 ans. « Ça évite d’avoir des protections dans nos sacs. Parfois les garçons les fouillent, sortent nos serviettes et se moquent de nous. » Aïssetou, 14 ans, acquiesce : « Il devrait y en avoir partout, sinon on est obligées de demander aux surveillants ou aux animateurs. C’est difficile. Une fois, une copine m’a expliqué qu’elle n’avait pas les moyens de se payer des protections. » Niuma, 15 ans, appuie : « Pour certaines, ça peut être cher 2 euros pour acheter un paquet de serviettes. »
Les adultes qui encadrent ces jeunes voient en ces installations d’autres avantages. L’équipe de l’antenne jeunesse Hoche réfléchit ainsi à consacrer un Blablathé, du nom de ces discussions informelles autour d’une boisson, à la précarité menstruelle et aux règles. « On laisse aux filles le temps de se familiariser avec le distributeur avant d’impulser cet échange qui nous semble nécessaire, explique un animateur. Car si elles en parlent plus facilement avec nous, le tabou perdure entre jeunes. »
Succès immédiat
Certains des 15 premiers distributeurs installés – 12 autres seront mis en service au printemps 2024 – ont connu un succès immédiat, en particulier au centre administratif où 400 serviettes ont été retirées en un mois et demi. « La précarité menstruelle qui touche près d’un tiers des femmes pose de vrais problèmes de santé publique, explique Philippe Lebeau, conseiller municipal délégué à la Santé et au Handicap. Au-delà du risque de choc toxique si on garde trop longtemps un tampon et d’infection urinaire si on ne change pas assez sa serviette, il existe un risque social si la femme s’absente du travail, un risque psychologique provoqué par le manque d’estime de soi et un problème économique quand on dispose de peu de ressources. L’État dit réfléchir à la gratuité ; la ville, elle, a anticipé ! C’est un vrai choix politique de la part de la municipalité que de proposer des protections gratuites et écologiques à toutes celles qui en ont besoin ! »
*Selon le rapport d’information sur les menstruations, déposé en 2020 par la délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes.
Bien culottées, la confiance retrouvée
Depuis le mois dernier, des culottes menstruelles sont distribuées gratuitement par le Centre communal d’action sociale (CCAS) à des femmes en situation de précarité.
« Avec l’inflation, on voit de plus en plus de mères célibataires ou d’adolescentes qui se protègent mal ou de façon insuffisante pendant leurs règles. La précarité menstruelle est un sujet prégnant, même si les femmes ne se confient pas facilement », indique Nicolas Romarie, secrétaire général du Secours populaire de Pantin, partenaire du nouveau dispositif mis en place par le pôle Aides et Animations du CCAS.
Actuellement, les antennes pantinoises du Secours populaire et des Restos du cœur, ainsi que les pôles Social et RSA de la ville, repèrent, parmi leurs usagères, des femmes en situation de fragilité sociale et en capacité de gérer l’entretien des culottes menstruelles. Elles sont ensuite reçues au CCAS où une première culotte leur est remise. Si elles en sont satisfaites, trois autres leur seront données.
Un millier de culottes menstruelles écologiques ont été achetées par la ville et 250 femmes pourraient être concernées par ce dispositif. Fabriquées en coton bio et fibres végétales absorbantes, ces protections, disponibles en plusieurs tailles et plusieurs flux, ont une durée de vie de 3 à 4 ans.
Prendre soin de la santé des femmes
Rassembler, dans un même lieu, des médecins spécialisés, mais aussi des personnels médicaux et paramédicaux formés à la prise en charge des divers aspects de la vie d’une femme, de l’adolescence à la ménopause, tel est le concept du centre de santé Gynea qui devrait ouvrir en septembre 2024 rue de l’Ancien-Canal.
Comme le premier centre Gynea ouvert l’an dernier dans le XVIIIe arrondissement de Paris, celui de Pantin s’articulera autour de la santé sexuelle et reproductive des femmes, avec des consultations de sages-femmes et de gynécologues, mais aussi de radiologues spécialisés réalisant des échographies pelviennes ou durant la grossesse. Ce centre de santé proposera également des consultations d’ostéopathie, de kinésithérapie, de diététique et de psychologie.
Une prise en charge globale
Victoire Mulliez, co-fondatrice de Gynea, explique : « Nous voulons créer un espace de santé global pour les femmes. Nous proposerons, par exemple, de l’activité physique au moment de la ménopause afin d’aider les patientes à conserver leur masse musculaire ou des suivis diététiques à certaines périodes clés de leur vie : l’adolescence, la grossesse et la ménopause. Nous organiserons parallèlement des groupes de parole animés par des psychologues, parfois en binôme avec une sage-femme. Ces rencontres seront conçues comme des espaces bienveillants et sécurisants devant permettre aux femmes de s’exprimer. »
Le futur centre devrait enfin proposer des consultations de santé mentale autour de diverses problématiques comme les parcours PMA, les arrêts de grossesse, la périnatalité ou les violences sexuelles et sexistes.
Congé menstruel : expérimentation prévue en 2024
L’une des difficultés auxquelles les femmes sont confrontées durant leur vie concerne les douleurs liées aux règles. Ces dernières, parfois invalidantes voire incapacitantes, peuvent en effet représenter un frein dans tous les aspects de leur vie professionnelle. Conscient du problème, le conseil municipal a voté, le 22 juin, un vœu demandant une expérimentation du congé menstruel à destination des agentes de la ville. Dans la foulée, un travail a été lancé par l’administration municipale afin d’étudier la manière de le mettre en place courant 2024.
Pour rappel, l’Espagne est actuellement le seul pays d’Europe à avoir instauré par la loi un congé menstruel entièrement pris en charge. En France, il n’existe pas de législation sur ce sujet : seules des propositions de loi – émanant de parlementaires et non du gouvernement – ont été déposées devant l’Assemblée nationale et le Sénat, sans vote pour l’instant. Côté collectivités, de rares expérimentations sont en cours ou à venir à Bagnolet, Saint-Ouen, Aubervilliers, Abbeville et dans la métropole de Lyon.
Retrouvez les autres articles du dossier "L'égalité en grand !" réalisé par Catherine Portaluppi, Guillaume Gesret et Guillaume Théchi, publié dans Canal n°322, décembre 2023 :
> "Année de l'égalité : le bilan !"
> "Lutter contre les violences faites aux femmes : une priorité partagée"
> "Le sport pour l'égalité femmes-hommes !"