Ernestine Ronai, lauréate du Trophée de l'égalité 2025 © Amélie Laurin

Égalité femmes-hommes

Trophées de l'égalité : récompenser l'action

Vendredi 7 mars, lors du Dîner de l’égalité, la ville a remis cinq trophées à des personnalités qui agissent en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. Présentation des lauréats 2025.

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Un article de Guillaume Gesret publié dans Canal n°335 avril 2025

Sheila Gasmi, l’urgence de l’égalité

Responsable des urgences à l’hôpital Avicenne, Sheila Gasmi considère qu’elle a dû briser un double plafond de verre pour accéder à ce poste. « Je suis non seulement une femme, mais aussi issue de l’immigration », explique-t-elle.

 

À 46 ans, cette médecin urgentiste a misé sur sa seule force de travail pour gravir les échelons du milieu hospitalier. « Comme je ne compte pas mes heures, les chefs, tous des hommes, m’ont donné ma chance. J’observe aujourd’hui que l’égalité s’impose petit à petit, du moins à l’hôpital Avicenne qui est dirigé par une femme. »

Le soir de la remise de son trophée, Sheila Gasmi a pensé très fortement à ses parents. « Ce sont eux qui m’ont poussée à faire des études pour devenir libre et indépendante. » Cette éducation a porté ses fruits puisque sa sœur, Rym Gasmi, a également reçu un trophée le 7 mars pour son engagement en tant qu’avocate à la Maison des femmes.

Collectif d’avocates, unies pour le droit des femmes

Elles sont sept avocates à s’être vu remettre un Trophée de l’égalitéle 7 mars. Toutes Pantinoises, elles assurent à tour de rôle la permanence du vendredi matin à la Maison des femmes.

Zouina Lalam et ses consœurs – Zakia Bey, Rym Gasmi, Angélique Goncalves Brasileiro, Caroline Gorvitz, Delphine Casadei et Oznur Apaydin – ont accepté sans hésiter la proposition de la ville de conseiller les femmes accueillies rue Pasteur. « Nous sommes toutes formées à la défense des victimes. Depuis un peu plus d’un an, nos interventions sont très larges et dépassent le cadre des violences intrafamiliales. Nos compétences en droits pénal, civil, des étrangers ou du travail permettent de démêler des situations compliquées », précise Zouina Lalam, la référente du collectif.

À elles sept, elles maîtrisent également plusieurs langues (anglais, arabe, turc, espagnol, portugais, kabyle), ce qui facilite l’accueil des personnes d’origine étrangère. « Ce trophée récompense une équipe pugnace, motivée et bienveillante au service des femmes », concluent-elles.

Ernestine Ronai, 40 ans de lutte

Depuis 40 ans, elle est l’incarnation de la lutte contre les violences faites aux femmes. Son engagement au sein de l’association Femmes solidaires lui a fait prendre conscience, dans les années 80, de l’ampleur des violences conjugales et de leurs impacts sur les femmes et les enfants. En 2002, Ernestine Ronai fonde ainsi le premier Observatoire des violences faites aux femmes de Seine-Saint-Denis.

Une dizaine d’années plus tard, on la retrouve à l’initiative du dispositif Téléphone grave danger, alors qu’elle occupe des fonctions au sein de la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences. « C’est le projet dont je suis le plus fière ! », explique la septuagénaire qui a aussi formé des agents municipaux à la question des violences de genre.

Élevée à la dignité d’officier de la Légion d’honneur en 2020, Ernestine Ronai n’a pas boudé son plaisir lors de la remise de son Trophée d’honneur par Bertrand Kern, le maire de Pantin. « C’est toujours agréable de recevoir une distinction, surtout que celle-ci vient du terrain, du local. Cela montre que mon action a des répercussions concrètes. »

Zahia Ziouani, la force de la musique

On ne présente plus Zahia Ziouani. La cheffe d’orchestre a dirigé sa formation symphonique lors de la cérémonie de clôture des Jeux olympiques de Paris et son parcours a été porté à l’écran en 2022 dans le film Divertimento.

La quadragénaire, qui a grandi à Pantin et y vit toujours, a fondé son propre orchestre à l’âge de 20 ans pour pouvoir le diriger et ainsi faire tomber les barrières. « J’ai dû batailler pour me faire une place dans ce milieu, explique-t-elle. On m’a tellement dit que ce n’était pas un métier pour les femmes… Mais aujourd’hui, je jouis d’une grande liberté artistique. Car, le fait d’être une femme, d’origine algérienne, venant d’un milieu social populaire, j’en ai fait une force ! »

En créant l’académie Divertimento, qui regroupe des élèves de conservatoires du département, Zahia Ziouani n’en finit pas de rendre la musique classique populaire. En concert à Pau le soir de la remise de son trophée, elle s’est fait représenter par sa sœur jumelle, Fettouma, violoncelliste de renom qui a cofondé l’orchestre, et par Sara Correia, une élève de l’académie.

Licentia Poetica, la voix des habitants

Le 7 mars, ce sont Sarah Douinine et Hassan Syllan, les comédiens qui jouent dans le court-métrage Amour mortifère, qui sont venus récupérer le trophée au nom de l’association Licentia Poetica. Ce film, diffusé à la maison de quartier des Courtillières lors de la Journée de lutte contre les violences faites aux femmes, raconte le parcours d’une jeune femme victime des coups de son mari.

Abdoullah Ben Saïd, fondateur et directeur de l’association, a réalisé et monté cette fiction avec la complicité d’un groupe de Pantinois. « Nous avons organisé des ateliers d’écriture auxquels ont participé des jeunes des Courtillières, mais aussi des femmes des associations Nénuphar et La Casa des Pantinois », précise-t-il.

Au total, une quinzaine de personnes se sont ainsi rassemblées en amont du tournage. « Cet exercice d’écriture collective a libéré la parole sur les violences intrafamiliales », note Abdoullah Ben Saïd, « agréablement surpris » par l’attribution de ce trophée. « Au sein de notre association, nous recourons au cinéma et à la musique comme outils de médiation sociale. Cette récompense, qui valorise surtout les habitants des Courtillières, nous encourage dans notre nouveau projet de web série, Le Sang, diffusée dans les prochains mois sur YouTube. »